La Chimère, créature mythique par excellence


Aujourd’hui, je vous parle de la Chimère, créature légendaire qui est arrivée seconde au classement du sondage que j’avais organisé il y a… un mois et demi ?

Bien que la Chimère soit une créature très présente dans les univers ludiques (jeux de rôle, jeux vidéos et jeux de figurines), je n’ai pas trouvé beaucoup d’informations à son propos. Ou alors toutes mes sources étaient redondantes. Il fallait vraiment chercher dans des ouvrages précis et spécialisés pour trouver des informations plus complètes et des interprétations des textes originaux. Je ne vous cache pas que je n’ai pas pris le temps de me plonger dans ces ouvrages, d’une part parce que je n’en avais pas le temps et, d’autre part, parce que mon portefeuille n’est pas assez dodu que pour me le permettre.

Présentation

La Chimère est un monstre issu de la mythologie grecque. Elle serait née de l’union entre Échidna et Typhon et est la sœur de Cerbère, du Sphinx, des harpies et de l’Hydre de Lerne. Elle fut tuée par Bellérophon chevauchant Pégase.

La Chimère est une créature composée d’un lion, pour la moitié avant de son corps, d’une chèvre, pour la moitié arrière, et d’une queue de serpent. Il s’agit d’un monstre femelle crachant des flammes. Certaines versions parlent d’une queue de dragon, mais il faut savoir que chez les Grecs, les dragons étaient de gros serpents divins (comme Python, Ladon ou l’Hydre de Lerne).

Je vous invite très fortement à jeter un œil à l’illustration ci-dessous pour y voir plus clair :

La Chimère
Source : www.alex-bernardini.fr

D’un point de vue symbolisme, je pensais qu’on ne pourrait pas égaler le phénix, mais la Chimère se défend ! Dans le genre disparate, c’est pas mal non plus.

Tout comme le phénix, la signification et la symbolique de la Chimère ont changé avec le temps.

D’abord, la Chimère est constituée de 3 animaux aux symboliques fortes, mais surtout opposées. Ainsi, si le lion qui la constitue représente, d’un côté, la royauté, la puissance, le courage, la générosité, la noblesse et la force, d’un autre, il est le symbole de la cruauté et de la férocité.

La chèvre, quant à elle, peut être rapprochée symboliquement soit de la vache, emblème de la mère bienveillante, soit du bouc, représentant du comportement lubrique et libidineux.

Et pour finir, le serpent qui est un symbole ambivalent chez les Grecs de l’Antiquité puisqu’il est un gardien de biens divins (comme Python qui protégeait l’oracle de Delphes ou encore Ladon qui protégeait les pommes d’or du jardin des Hespérides), mais on lui attribue également un caractère perfide et rusé.

Quand on sait que la Chimère était considérée comme un animal malfaisant : elle ravageait par le feu les terres de la Lycie au pied du Mont Chimère (appelé actuellement Yanartaş), on considère donc que ce monstre est un condensé de cruauté, de pensées lubriques et de perfidie. La Chimère représentait donc les vices que les Grecs méprisaient le plus.

Lycie
Bibi Saint-Pol, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

Ainsi, le mythe de Bellérophon (le héros vertueux) chevauchant Pégase (le noble destrier) tuant la Chimère est donc vu comme une allégorie de la vertu vainquant le vice.

Je ne sais pas vous, mais cette histoire me rappelle celles de Saint-Georges et de Saint-Michel tuant les dragons, symboles de tous les péchés.

Les Grecs considéraient que la Chimère était un présage de tempêtes, de naufrage et de catastrophes naturelles, surtout volcaniques.

Au Moyen-Âge le mot chimère prend un tout autre sens : il ne désigne plus un monstre particulier, mais une créature disparate constituée de morceaux de diverses bêtes réelles et connues de tous. Il devient également le symbole de la tentation et des désirs irréalisables.

Au XIXe siècle, la Chimère devient une allégorie très complexe de créations imaginaires, voire oniriques, issues des profondeurs de l’inconscient, représentant les désirs inassouvis, sources de frustrations et plus tard de douleur. La chimère gagne une dimension : elle devient métaphysique.

Et une dernière pour la route : selon Robert Graves (poète et romancier britannique du XIXe), la Chimère est la représentation des 3 âges d’une femme et sa défaite face à Bellérophon, est une allégorie de la déchéance du matriarcat qui avait court avant l’arrivée du patriarcat des Achéens.

D’une part, les 3 animaux qui composent la Chimère représentent la puberté (le lion fier et puissant), la maturité (la chèvre maternelle et bienveillante) et la ménopause (le serpent sage et gardien du savoir). Et d’autre part, on attribuait également à ces mêmes animaux les 3 saisons de l’année : le printemps pour le lion, l’été pour la chèvre et l’hiver pour le serpent. L’assemblage de ces trois éléments de la compréhension du temps et de la nature symbolisait la vie qui passe, la vie dans son cours : la Déesse-Mère dans son accomplissement.

La légende selon laquelle elle fut tuée signifie l’abandon de son culte et de ses prérogatives, remplacés par ceux des nouveaux dieux masculins. Sa capacité à cracher du feu correspond au respect qui lui était dû et qui, si vous lui désobéissiez, vous embrasait. Le symbole du serpent se retrouve dans la Genèse de la Bible comme un symbole féminin et néfaste ; et dans la religion chrétienne on donne encore à la Vierge le pouvoir de dominer son serpent. Il est intéressant de noter que, dans les temps anciens, le serpent était le symbole d’un âge, d’une époque de l’année, il est devenu un symbole phallique dans la société patriarcale.

Quand on sait que la femme était considérée comme une simple machine à enfanter durant l’Antiquité, cette interprétation me laisse songeuse…

Origines

La première mention écrite que l’on trouve parlant de la Chimère est dans l’Iliade d’Homère dans laquelle l’un des personnage raconte l’histoire de Béllerophon et dans laquelle, il n’est pas fait mention qu’elle peut cracher du feu.

Mais si tu veux savoir qu’elle est ma race que connaissent de nombreux guerriers, sache qu’il est une ville, Epyré, au fond de la terre d’Argos féconde en chevaux. Là vécut Sisyphos, le plus rusé des hommes, Sisyphos Aiolidès ; et il engendra Glaukos, et Glaukos engendra l’irréprochable Bellérophontès, à qui les Dieux donnèrent la beauté et la vigueur charmante. Mais Proitos, qui était le plus puissant des Argiens, car Zeus les avait soumis à son sceptre, eut contre lui de mauvaises pensées et le chassa de son peuple. Car la femme de Proitos, la divine Antéia, désira ardemment s’unir au fils de Glaukos par un amour secret ; mais elle ne persuada point le sage et prudent Bellérophontès ; et, pleine de mensonge, elle parla ainsi au roi Proitos :

– Meurs, Proitos, ou tue Belléronphontès qui, par violence, a voulu s’unir d’amour à moi.

Elle parla ainsi, et, à ces paroles, la colère saisit le Roi. Et il ne tua point Bellérophontès, redoutant pieusement ce meurtre dans son esprit ; mais il l’envoya en Lykiè avec des tablettes où il avait tracé des signes de mort, afin qu’il les remît à son beau-père et que celui-ci le tuât. Et Bellérophontès alla en Lykiè sous les heureux auspices des Dieux. Et quand il y fut arrivé, sur les bords du rapide Xanthos, le roi de la grande Lykiè le reçut avec honneur, lui fut hospitalier pendant neuf jours et sacrifia neuf boeufs. Mais quand Eôs aux doigts rosés reparut pour la dixième fois, alors il l’interrogea et demanda à voir les signes envoyés par son gendre Proitos. Et, quand il les eut vu, il lui ordonna d’abord de tuer l’indomptable Khimaira. Celle-ci était née des Dieux et non des hommes, lion par devant, dragon par l’arrière, et chèvre par le milieu du corps. Et elle soufflait des flammes violentes. Mais il la tua, s’étant fié au prodiges des Dieux.

Hésiode en fait également mention mais en la désignant comme un monstre tricéphale crachant du feu.

Et par la suite, Appollodore reprend les deux descriptions en une : « Elle avait la partie avant d’un lion, la queue d’un dragon, et son troisième chef, celui du milieu, de chèvre. Elle vomissait du feu et dévastait le pays en harcelant le bétail, car elle était un être unique avec la puissance des trois bêtes. »

Il existe enfin une dernière version du mythe de la Chimère, celle de Plutarque qui raconte que Bellérophon serait un prince de Lycie, la Chimère n’était pas un monstre mais un capitaine pirate nommé Chimarros, qui aurait causé de nombreux dommages aux Lyciens. Son bateau était orné d’un lion à la proue et d’un dragon à la poupe, tandis que sur sa voile était représentée une chèvre. Bellérophon l’aurait pris en chasse avec le navire dont il s’est emparé, le Pégase, et l’aurait tué.

Comment intégrer une ou plusieurs chimères à votre récit ?

Selon le Trésors de la langue française informatisé (TLFi pour les intimes), la chimère est également un « Animal fantastique qui permet l’évasion dans des rêveries sans consistance. Galoper mille chimères (cf. E. de Guérin, Lettres, 1839, p. 331) ; chevaucher la chimère (cf. Van der Meersch, Invasion 14, 1935, p. 427) : … elle songe. (…) Dans quelle contrée du pays bleu, à la porte de quel paradis perdu, son désir bat-il de l’aile ? Sur la croupe de quelle chimère, prend-elle son envolée dans le rêve ? J. Péladan, Le Vice suprême,1884, p. 2. »

J’adore cette idée de faire de la Chimère un coursier onirique qui nous mènerait de rêve en rêve.

Pendant mes recherches, je suis tombée sur le site d’une guilde (un regroupement de joueurs d’un même jeu qui s’unissent sous une même bannière dans le but de s’entraider) qui a réécrit le mythe de la chimère pour mieux l’intégrer dans leur jeu. Je vous la retranscris :

Elle est éternelle et invulnérable.

Aucun mortel ne l’a jamais approchée, ni même jamais vue : tout au plus certains, plus chanceux que d’autres, l’ont entraperçue au détour d’un chemin sauvage. Ils ne sont alors plus jamais les mêmes, transformés par leur rencontre avec la créature.

Un jour vint le temps où la Chimère elle-même plongea dans la torpeur. La trois centième lune approchait : après une forte activité sur le monde de Daifen*, la créature s’endormit profondément. Plus personne n’en entendit parler pendant des centaines de lunes.

Ne croyez pas cependant, qu’elle était morte ou qu’elle avait disparue. Non ! La Chimère est éternelle et invulnérable.

Elle s’était assoupie, tout simplement. Profondément endormie, elle ne baignait plus les continents de son rugissement conquérant. Ses apparitions se firent plus rares, les mortels n’ayant plus aucune opportunité de la rencontrer. Mais certains la rencontraient encore, cependant : en effet, même au plus profond de son sommeil, la Chimère rêvait ! Sa puissance et sa conscience s’étaient scindées en plusieurs avatars qui parcouraient librement le monde par le biais du rêve des mortels :

  • L’avatar Lion visitait les songes des personnes courageuses et dominatrices celles marquées du sceau de la puissance et du charisme, nanties d’une volonté inébranlable.
  • L’avatar Chèvre préférait hanter les rêves des penseurs, avides de nourriture spirituelle, ainsi que ceux dotés de sagesse, de diplomatie, ou ayant voué leur vie à la grâce.
  • Quant à l’avatar Serpent, il s’insinuait dans les songes des instinctifs, des discrets, de ceux qui suivent leurs pulsions et de ceux pour qui filouterie et ruse sont des modes de vie.

Certains des rêveurs visités ne surent jamais ce qu’ils avaient rencontré dans leur sommeil, au détour d’un rêve sans doute trop étrange. D’autres s’en aperçurent, conscients d’avoir reçu quelque chose de la part de la créature mythologique : une parcelle d’elle-même, un fragment de sa conscience et de sa puissance. Ainsi étaient-ils transformés par le contact onirique de la Chimère.

Alors ces personnes choisirent de prendre la route, en quête de leurs semblables, ceux qui, comme eux, ont été investis d’une portion de la créature mythologique. Peut-être ce choix est-il le leur : ne sont-ils pas suzerains et seigneurs de Daifen* ? Mais peut-être n’est-il qu’un reflet des souhaits de la Chimère elle-même : lorsque toutes ces parcelles seront rassemblées, la Chimère s’éveillera à nouveau et poussera sur le monde de Daifen* son long rugissement.

*Daifen est le nom du monde dans lequel se déroule leur jeu.

Je ne vous donne pas l’adresse du site tout simplement parce qu’il est envahi par des pop-up de pub.

Dans cette version-ci, la chimère est de nouveau une créature onirique, à la différence qu’ici elle est l’instigatrice de rêves et de visions qui poussent ses victimes à se retrouver afin de la réveiller.

Dans le manga Full Metal Alchemist, les chimères sont des êtres hybrides créés artificiellement.

D’autres pistes de réflexion sont, bien sûr, ouvertes, la chimère pourrait être :

  • une déesse (ou un dieu) ou son avatar
  • une gardienne de trésor
  • un monstre à affronter
  • un animal chassé pour sa viande, sa peau, ses dents, ses sabots,…
  • un familier de magicien-ne
  • etc.

Laissez libre cours à votre imagination ! 😉

J’espère que cet article vous a plu ! Si vous avez des questions ou juste envie de papoter, n’hésitez pas ! Les commentaires sont là pour ça ! 😉

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