Héros, personnage principal ou protagoniste ?


Aujourd’hui, j’avais envie de parler de notions qui ont tendance a être mélangées de la part des auteurs et autrices à l’heure actuelle : les différences entre héros, personnage principal et protagoniste.

En effet, pour beaucoup de personnes, ces trois notions sont synonymes alors que, en réalité, que nenni !

Et j’espère, d’ailleurs, que l’explication des différences entre ces notions vous permettra de considérer la narration de vos histoires sous des angles différents. On voit ça dans le dernier point de l’article — même si vous êtes très curieux ou curieuse, lisez tout de même le reste de l’article, hein ! 😅

Le protagoniste

À l’origine, le terme de protagoniste est issu du théâtre grec antique et désignait l’acteur principal de la pièce. Donc, pas le personnage, mais bien l’acteur. Mais plus que cela, le personnage interprété par le protagoniste (donc l’acteur principal) était le personnage clé de l’intrigue, celui autour duquel l’intrigue tournait.

Ce n’est que par la suite que, par analogie, protagoniste a fini par désigner le personnage clé de l’intrigue, celui qui fait avancer l’action, celui qui est confronté au plus de conflits narratifs dans le récit.

Il est celui qui s’oppose à l’antagoniste, dont nous parlerons dans un autre article.

Le héros

Lorsque l’on reprend le schéma actantiel (trop souvent négligé à mon sens si on veut vraiment construire un roman intéressant wink ), on voit que le héros est le personnage qui se voit confier une quête. Et ça s’arrête là. Ce rôle est également appeler le sujet.

Bien souvent il est également le personnage qui mène l’action, mais pas toujours.

Le personnage principal

Le personnage principal est le personnage par lequel le lectorat suit l’action. C’est le narrateur ou le personnage que le narrateur suit.

Les différences

Je peux comprendre que tout cela vous paraisse obscur, c’est pour ça que je crois qu’un petit débriefe peut s’avérer utile.

Dans les différentes définitions que je vous ai données, j’ai parlé de 3 concepts :

  • mener l’action
  • se voir confier une quête
  • raconter l’histoire

Ces 3 concepts peuvent être effectués par 3 personnages différents au sein d’un même roman, mais c’est très rare. En général, héros et protagoniste se confondent.

Mais, imaginons :

A reçoit la mission de délivrer X du sort qui l’emprisonne car A est la seule personne au monde à savoir briser le sort juste avec quelques goûtes son sang. Pour effectuer cette mission, B, son écuyer, l’accompagne, ainsi que C, son âne de bât.
Sur le chemin menant à X, A mène un combat, le perd et tombe dans les pommes. Résultat, B charge A sur le dos de C et effectue tout le chemin, contourne toutes les embûches et combats tous les ennemis pour mener A devant la prison ensorcelée de X. A se réveille à ce moment-là, s’entaille la paume de la main, récite deux-trois incantations histoire de dire que et *POUF !* X est libre.
Et toute cette histoire est racontée du point de vue (interne à la 1re personne) de C.

Dans cette histoire, les trois rôles sont tenus par les 3 personnages :

  • A est le sujet/le héros puisque c’est à lui de réaliser la quête, l’étape finale de délivrer X.
  • B est le protagoniste puisque c’est lui a mené toute l’action, surmonté toutes les péripéties pour que A puisse mener à bien sa quête.
  • C est le personnage principal puisque c’est de son point de vue que nous avons suivi l’histoire.

Pour vous donner quelques exemples plus concrets :

  • Dans les diverses enquêtes de Sherlock Holmes, Watson est le personnage principal puisque c’est lui qui raconte l’action et Holmes est le héros puisque c’est à lui que les enquêtes sont confiées. Si, dans la plupart des récits, c’est Holmes le protagoniste, il arrive que Watson le soit quand Holmes est trop à l’ouest pour mener les enquêtes. Dans ces cas-là, Watson fait tout le boulot préliminaire et c’est Holmes qui met le point final à l’enquête.
  • Dans Hypatia de Arnulf Zittelman, le personnage principal est l’élève d’Hypatia, héros et protagoniste du récit.
  • Dans Le Chevalier inexistant d’Italo Calvino, le personnage principal et protagoniste de l’histoire est l’adjuvant du héros, qui n’est autre que le Chevalier inexistant lui-même.
  • Dans Terminator, le cyborg est le personnage principal de l’histoire, mais il n’en est ni le protagoniste, ni le héros. Il est l’antagoniste.

Quel est l’intérêt de connaître la différence entre ces trois notions ?

Je suis certaine que, maintenant, vous voyez parfaitement où j’ai voulu en venir avec cet article : jouer avec votre lectorat.

Nous sommes arrivés à une époque où ces trois rôles sont presque systématiquement fondus en un ou deux personnages et où l’on joue très peu sur ces différents codes. Même chez les grands auteurs et les grandes autrices. Et, en toute honnêteté, je trouve ça dommage.

Pour ma part, dans Neph et Shéa, j’ai monté le schéma actantiel pour faire en sorte d’avoir 2 personnages principaux, 3 héros et 5 protagonistes. C’est-à-dire 2 personnages par lesquels on suit l’histoire, 3 personnages qui ont des quêtes et 5 personnages qui font avancer l’histoire.

Donc, même si vous savez que je suis contre l’originalité à tout prix, je ne suis pas contre l’originalité tout court — c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je tiens ce blog : apporter d’autres points de vue et inspirations pour qu’on arrête de voir la même chose partout 😉

Et jouer sur les codes de perception du héros/protagoniste/personnage principal, peut être très intéressant pour jouer sur l’intrigue elle-même.

En outre, vous pouvez également jouer avec ces codes en cours de récit. Par exemple :

  • Le faux protagoniste : il s’agit d’une technique narrative qui consiste à faire croire au lecteur pendant un certain temps que le personnage introduit en début de récit est LE protagoniste de l’histoire, alors qu’en fait il ne l’est pas : soit c’est « juste » le personnage principal, soit c’est un personnage secondaire destiné à mourir, soit c’est l’antagoniste, etc.
  • Changer de protagoniste au cours de l’histoire : comme je vous l’ai précisé plus haut, le protagoniste est celui qui mène l’action, donc, vous pourriez très bien faire en sorte qu’un personnage mène l’action pendant un temps puis quitte l’histoire (en mourant, en allant suivre une autre voie, etc.), passant ainsi le flambeaux à un autre. — C’est un schéma que l’ont retrouve dans certains récits de quête initiatique où le mentor est le véritable protagoniste jusqu’à ce qu’il meurt, accordant ainsi son rôle de meneur de l’action au héros.
  • Le faux héros : à l’instar du faux protagoniste, on peut présenter un personnage comme étant celui qui doit accomplir la quête, alors que, en réalité, cette tâche incombe à un autre personnage. — Je pense au dessin animé « Merlin l’enchanteur » (inspiré du roman « L’Épée dans la pierre » de Terence Hanbury White) où Merlin est le protagoniste de l’histoire, Moustique/Arthur le personnage principal et Kay (le frère adoptif de Moustique/Arthur) est le faux héros puisque c’est lui qui doit s’entraîner pour gagner le tournoi qui le désignera comme roi alors que c’est Arthur qui doit le devenir et qui est, de ce fait, le vrai héros de l’histoire.

Il est également possible de jouer sur les codes de la quête soit en la faisant évoluer au cours du récit, soit en faisant en sorte que le héros ne l’accomplisse pas. Le héros peut :

  • échouer en mourant ou en ne la réalisant pas des le temps imparti, par exemple
  • renoncer parce que la quête n’est pas/plus en accord avec ses valeurs (c’est un retournement classique dans les dystopies où le héros change de camp), parce que le sacrifice qu’il doit faire pour réaliser sa quête est trop important et il préfère renoncer (par exemple, il doit choisir entre sauver la personne qu’il aime ou tuer le Grand-Méchant-Vilain-Pas-Beau et il préfère laisser le soin à quelqu’un d’autre de tuer le GMVPB pour partir avec sa belle/son beau), etc.

On se limite souvent à ne développer que la base du roman à savoir : sa manière de raconter l’histoire (son style), l’intrigue, le cadre et les personnages. Mais on oublie souvent de jouer avec les codes de la narratologie.

Voilà ! J’espère que ce petit article conseils d’écriture vous a plu ! N’hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé et vous aimeriez voir plus d’articles dans ce genre-là.

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