Les races dites tolkieniennes sont-elles vraiment tolkieniennes ?


Aujourd’hui, j’avais envie de revenir sur LA question que l’on me pose dès que j’aborde le sujet du plagiat : « OK, mais est-ce que j’ai le droit de mettre des elfes/nains/hobbits/orcs (biffer les mentions inutiles) dans mon univers ? »

Ma réponse est systématique : « Oui, puisque ce n’est pas Tolkien qui les a inventées. »

Comme il semblerait que pour beaucoup, avant Tolkien, il n’y avait rien, j’ai décidé de vous faire un petit article pour rappeler que Tolkien n’a presque rien inventé, mais tout adapté et réorganisé.

Cependant, loin de moi l’idée de dédaigner le travail incommensurable de Tolkien ! Mais ce que Tolkien a apporté à la Fantasy, et à la littérature en règle générale, ce ne sont pas des éléments pris indépendamment, c’est une cohérence et un renouveau.

Des elfes, des nains, des demi-dieux, des langues inventées, des ours-garous, des pays imaginaires, des quêtes épiques, etc., il en existait déjà bien avant Tolkien. La pierre qu’il a réellement ajoutée à tout cet édifice, c’est un nouveau regard sur la littérature d’imagination. Un nouveau paradigme, en somme, la preuve que l’on peut faire autre chose que des récits pour enfants ou des histoires sombres et violentes.

La Fantasy existait longtemps avant J.R.R. Tolkien.

[…]

Tolkien a changé la Fantasy ; il l’a élevée pour la redéfinir, à un tel point qu’elle ne sera jamais plus la même.

[…]

Les marques d’influence de Tolkien sont légion, mais à mes yeux, l’une d’entre elles dépasse les autres de loin : J.R.R. Tolkien a été le premier à créer un univers secondaire pleinement accompli, un monde entier avec sa propre géographie, ses propres histoires et légendes, sans aucun lien avec les nôtres, et pourtant tout aussi réel d’une certaine façon. « Frodon est vivant », affirmaient peut-être les badges des années soixante, mais ce n’était pas une image de Frodon que les lecteurs de Tolkien collaient aux murs de leur chambre, c’était une carte. La carte d’un lieu qui n’a jamais existé.

G.R.R. Martin dans Méditations sur la Terre du Milieu

Les races dites tolkieniennes

Traditionnellement, les races dites tolkieniennes sont les elfes, les nains et les hobbits. Parfois, on inclut également les orcs, les gobelins et les uruk-haï.

On les appelle ainsi car c’est grâce à l’œuvre de Tolkien qu’elles ont été popularisées. Suite au succès de Bilbo, le hobbit et du Seigneur des Anneaux, les œuvres dérivées et inspirées se sont multipliées, reprenant le modèle créé par Tolkien. Les lecteurs et lectrices ayant grandi avec les romans de Tolkien se sont empressées de chercher d’autres livres comme ceux-là, comme l’explique Robin Hobb dans Méditations sur la Terre du Milieu :

Le commentaire le plus fréquent que j’aie entendu chez les lecteurs de ma génération également abasourdis par Le Seigneur des Anneaux, c’est celui de n’avoir jamais rien lu de semblable, et d’avoir immédiatement essayé de trouver d’autres livres comme celui-là. Certains se sont même aussitôt assis pour essayer d’écrire des livres « comme celui-là » dans l’espoir d’apaiser leur propre appétit.

Mais alors, d’où viennent-elles réellement ?

Des mythes, des légendes et du folklore.

Ce n’est un secret pour personne que le maître éprouvait une passion dévorante pour Beowulf, un poème épique anglo-saxon composé entre la première moitié du VIIe siècle et la fin du premier millénaire. Il était également passionné par la mythologie scandinave dans son ensemble, notamment par les œuvres majeures reprenant les mythes et légendes millénaires des cultures germano-scandinaves : l’Edda, le Kalevala ou encore la Völsunga saga (adaptée en opéra par Wagner sous le nom de L’Anneau du Nibelung).

Parmi les inspirations de Tolkien, on compte également le folklore anglo-saxon et les œuvres de Shakespeare.

Les elfes

Les elfes de Tolkien sont directement inspirés des elfes lumineux (álfar) de la mythologie nordique auxquels il a ajouté certaines caractéristiques des elfes du Petit Peuple, issu du folklore celte.

Ainsi, cette race a la sagesse, la beauté et la longévité des habitants d’Álfheim et le lien fort avec la nature que l’on retrouve chez les elfes du folklore, cousins des petites fées.

Les nains

Avec les nains, c’est une plongée en plein cœur de Niflheim (ou Nibelheim, selon les versions) que nous offre le maître. Toujours issus de la mythologie nordique, les nains de Tolkien diffèrent peu de ceux des Scandinaves.

Les hobbits

Les origines et les inspirations des hobbits ne sont pas claires, même pour Tolkien lui-même. Cependant, il admet lui-même que ses hobbits lui rappellent fortement les Snergs du roman The Marvellous Land of Snergs de E. A. Wyke-Smith qui a bercé son enfance. Les Snergs étant des créatures de petite taille, qui aiment les fêtes et la nourriture, à l’instar des Hobbits.

Cependant, en creusant un peu, on peut supposer que les semi-hommes sont inspirés des hobgobelins du folklore britannique. Ils sont décrits comme amicaux, parfois serviables et vivent dans les campagnes.

Attention à ne pas les confondre avec les gobelins qui sont, quant à eux, des créatures souterraines maléfiques.

Les orcs, les gobelins et les uruk-haï

Notons que ces trois noms désignent la même chose : des orcs. (Ou orques, les deux orthographes ont cours)

À l’origine, Tolkien les avait nommés gobelins, mais a décidé de changer leur nom pour qu’on ne les confonde pas avec les gobelins du folklore, ceux dont on a parlé juste avant.

Les uruk-haï sont des orcs modifiés pour être plus forts, plus grands et plus résistants que les orcs originels.

Les ocs de Tolkien sont, eux aussi, issus de la mythologie nordique et plus précisément du poème Beowulf. Dans ce texte, il est fait mention d’un orcnēas (un monstre) : Grendel.

Toutefois, on peut noter que dans la langue courante, orc/orque est un synonyme de monstre. Ainsi, dans Le Capitaine Fracasse, Théophile Gautier nous dit par la bouche du baron de Signognac : « En effet, cette semaine je n’ai défait aucune armée, je n’ai combattu ni orque, ni dragon, je n’ai pas fourni à la mort sa ration de cadavres, et la rouille est venue à mon glaive (…) ».

Ici, on pourrait également parler d’ogre, dont la description correspondrait au personnage de Grendel.

Peut-on les réutiliser ?

OUI !

On peut les réutiliser et les adapter à sa sauce. D’ailleurs, même si ces races étaient de pures créations de Tolkien, il faut savoir que les concepts ne sont pas protégés par le droit d’auteur.

La seule restriction porte sur les noms inventés par le maître. Ainsi, vous pourrez parler de semi-hommes, mais pas de Hobbits ; de cavaliers noirs, mais pas de Nazgûl ; d’orcs, mais pas d’uruk-haï.

Voilà, j’espère que cet article a pu vous éclairer.

Prenez soin de vous !

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